Rapport d’information sur les archives

  • Mis à jour le lundi 11 juin 2018

1er février 2017

 

L’enquête de la Cour des comptes nous a conduits, André Gattolin et moi-même, à formuler six remarques.

 

1) Tout d’abord, nous constatons que la Cour des comptes dresse un bilan plutôt sévère de l’organisation et du fonctionnement des archives nationales. Les deux services spécialisés rencontrent en particulier des difficultés importantes. La grande majorité des remarques formulées par les magistrats nous paraissent tout à fait justifiées et nous estimons que la situation appelle une réforme rapide de la gouvernance des archives nationales.

 

La piste d’une transformation des trois services à compétence nationale nous paraît intéressante : on ne peut se contenter de formuler des vœux pieux, il faut agir ! Et le statut d’établissement public aura le mérite de contraindre les services, mais aussi la tutelle, à mettre en place des outils de gestion et de suivi plus rigoureux.

 

2) Deuxième remarque : pour éviter une nouvelle impasse immobilière, il est urgent que la construction d’un nouveau bâtiment à Pierrefitte-sur-Seine soit confirmée et que le financement de l’opération soit sécurisé. En effet, la fermeture du site de Fontainebleau et la sous-estimation des besoins au moment de la construction du centre de Pierrefitte conduiront, si rien n’est fait, à une saturation rapide des capacités de stockage des archives nationales. Nous estimons que la fermeture du site de Fontainebleau constitue une décision pertinente au regard des multiples problèmes que pose le site : présence d’amiante, instabilité des sols, inondation d’une partie importante des archives conservées… Mais la fermeture de Fontainebleau doit s’accompagner d’une extension rapide des capacités de stockage du site de Pierrefitte.

 

3) Troisième remarque : nous ne partageons pas la vision de la Cour des comptes selon laquelle le transfert des fonds actuellement conservés à Paris vers le site de Pierrefitte constituerait une réponse adaptée aux défis que pose le « quadrilatère Rohan Soubise », un bâtiment ancien classé au titre des monuments historiques. Ce transfert déstabiliserait le site de Pierrefitte-sur-Seine, déjà mis à rude épreuve avec le transfert des fonds de Fontainebleau, et fragiliserait le site parisien alors que celui-ci fonctionne plutôt bien. Il faut au contraire affirmer la dimension archivistique du site parisien, pour des raisons tout à la fois patrimoniales, pratiques et financières.

 

4) Notre quatrième remarque porte sur la gestion des ressources humaines des archives nationales.

Les temps de travail paraissent très favorables et peu contrôlés. En effet, le nombre d’heures dues est de 1 547 heures pour l’ensemble des agents (à l’exception des agents de direction) et de 1 533 ou 1 526 heures pour les agents bénéficiant de repos compensateurs supplémentaires, soit entre 60 et 81 heures de moins que le temps de travail minimum dans la fonction publique.

Cependant, au total, la rémunération des agents des archives nationales (en dehors des conservateurs du patrimoine) paraît moins avantageuse que celle des fonctionnaires travaillant en administration centrale – ce qui explique d’ailleurs pour partie les difficultés de recrutement auxquelles sont confrontés les trois services à compétence nationale des archives.

Nous pensons donc qu’il faut engager une réflexion globale sur le statut, la rémunération et l’organisation du travail des agents des archives, afin d’aligner à la fois leur temps de travail et leur traitement sur ceux des agents du ministère. Cette réflexion pourrait utilement se doubler d’un questionnement sur le nombre de postes d’encadrement et de direction, qui paraît encore aujourd’hui particulièrement important dans les trois services des archives nationales.

 

5) Cinquième remarque : nous pensons qu’il faut généraliser les missions d’archives dans les ministères versants. Ces « missions » sont des antennes du ministère de la culture, par opposition aux services ministériels intégralement financés par les ministères.

 

La généralisation du modèle des missions doit s’accompagner d’un renforcement du dialogue entre les missions et le service interministériel des archives de France.

Elle ne doit pas signifier un désengagement des ministères versants : si le ministère de la culture et de la communication assure la conservation des archives et le contrôle scientifique archivistique, il est essentiel que les ministères versants prennent leurs responsabilités en matière de collecte, en particulier au stade des archives intermédiaires.

 

En outre, le modèle de la mission doit être adapté aux spécificités ministérielles afin de garantir une certaine souplesse aux ministères versants.

 

6) Enfin, il nous semble que deux projets interministériels doivent être salués et confortés, malgré des modes de financement parfois discutables : il s’agit du projet VITAM, visant à créer un logiciel-socle d’archivage électronique, et du projet « France Archives » tendant à créer un portail internet de recherche d’archives commun à toutes les institutions d’archives publiques en France. Une première version devait être mise en ligne durant le mois de février 2017, qui devrait permettre aux archives publiques de peser face à la concurrence privée en matière d’archives et de mettre en valeur la complémentarité des fonds. En effet, les archives nationales, éclatées dans une multiplicité de structures différentes, ne gèrent pas la totalité des archives de l’État : ce sont les services départementaux des archives qui assurent la conservation des archives des services d’État déconcentrés.